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25 mai 2009 1 25 /05 /mai /2009 17:40

Ces livres qui font grandir les enfants de Joëlle Turin (collection passeurs d’histoires)

 

Les enfants ont-ils besoin de livres pour grandir ? Oui répond J Turin mais pas n’importe lesquels.

Quand les albums n'infantilisent pas les petits lecteurs, respectent leur rapport au monde, ne les enferment pas dans un " prêt-à-penser " mais au contraire donnent des clefs pour ouvrir toutes grandes les portes de leur imagination, alors la lecture devient une expérience unique qui contribue au développement de la pensée et de la sensibilité.

A travers 5 domaines évocateurs de la vie de l’enfant : ses jeux, ses peurs, ses grandes questions, ses relations avec les autres et le monde de ses sentiments, ce livre explore une centaine d'albums remarquables dans lesquels cette heureuse alchimie opère.

 

« C’es livres qui font grandir les enfants » suite

 LES AUTRES ET MOI

Un bébé tout seul ça n’existe pas. Tout nourrisson est en relation avec quelqu’un d’autre. Ce rapport, indispensable, vital, même au début de la vie, sert d’ancrage à tous les liens avenir que l’enfant, quittant l’exclusivité maternelle, tissera avec son entourage.

A travers le regard de ses proches se forgent peu à peu un sentiment de sécurité interne, une estime de soi, la conviction de ses capacités, de sa valeur.

Le jeune enfant dont la personnalité s’éveille a besoin d’être soutenu, guidé et conseillé par l’entourage dont il dépend, auquel il se fie sans réserve. Il a aussi besoin d’acquérir des règles, voire une certaine discipline pour vivre les premiers échanges avec les autres, se confronter aux premières négociations et affronter les premières rivalités.

L’enfant s’initie ainsi à la vie en société. Il apprend à communiquer, à s’affirmer, à respecter les règles établies et à partager.

GRANDIR EN AUTONOMIE

Vrrr…… de C Bruel et N Claveloux : album court de petit format, uniquement des onomatopées, traite du détachement de l’univers maternel.

Bravo, petit Ours de MWaddell et B Firth : un ours décide de quitter la quiétude de sa tanière pour partir en exploration. Valoriser un enfant dans ses apprentissages n’est pas seulement un bienfait c’est une nécessité.

DES ECHANGES FERTILES  Une autre forme de complicité passe par le dialogue.

Ferme les yeux de K Banks et H Gallensleben : le petit tigre n’a pas envie de dormir malgré la demande de sa mère, il trouve toujours une bonne raison. Chaque argument opposé par le jeune animal à celle-ci, loin de provoquer la colère, trouve aussitôt chez elle un écho, une ouverture qu’elle l’invite à partager.

·          Baboon de K Banks et G Hallensleben : un petit singe découvre son environnement, sa mère veille constamment à favoriser un rapprochement entre son enfant et le monde. Baboon  a ainsi le sentiment  d’exister pleinement pour quelqu’un, d’avoir en lui une richesse susceptible d’être appréciée des autres.

·          Je vais me sauver de MWise Brown et C Hurd  l’histoire consiste en une joute verbale entre un petit lapin qui veut se sauver et sa maman qui n’est pas d’accord.

·          Un amour de ballon de Komado Sakaï, petit livre très simple et pourtant remarquable qui met en scène une maman et sa fille autour de la perte d’un ballon.

EN TOUTE COMPLICITE dans les livres, comme dans la réalités, certaines grandes personnes réussissent le difficile exercice consistant à accompagner l’enfant dans une pénible découverte comme dans :

                Les questions de Célestine de G Vincent : le grand ours Ernest, vieux célibataire, n’a pas hésité à prendre chez lui la petite souris Célestine trouvée dans une poubelle. Il fait de ce qui aurait pu n’être qu’un désastre une chance.

·          Sept histoires de souris, Ranelot et Bufolet, une paire d’amis, Oncle Eléphant  de Arnold Lobet  histoires courtes et simples qui traduisent les relations entre grands et petits, basées sur le partage et le respect mutuel.

·          Poka et Mine de Kitty Crowther chacun ses désirs, ses rêves, ses peurs, ses forces et ses faiblesses, le lecteur peut facilement s’identifier à ces petits coléoptères.

L HEURE DES BETISES : nombre de situations partagées par les adultes et les enfants suscitent de véritables rapports de force ou bien obligent à des compromis. Bien des albums parlant de ces conflits privilégient la voie d’une autorité faite de souplesse et dégagées de principes trop rigides.

Va au lit Alfred, Mange ta soupe Alfred de Virginia Miller : situations mettant en cause l’autorité des parents, Alfred expérimente les limites du droit et la patience des adultes.

Non de Claude Ponti : Ponti par son humour et le soin qu’il apporte dans ses livres à réconcilier les petits avec le monde et ses épreuves, joue avec bonheur de toutes les révoltes enfantines face à l’autorité.

·          Maman Quinchon se fâche d’Anaïs Vaugelade. Les histoires qui illustrent le refus d’obéir offrent à l’enfant le loisir de reconnaître ses propres pensées et comportements sans ressentir de culpabilité.

·          L maman et le bébé terrible de b Lindgren et E Eriksson : le bébé imaginé par l’auteur dans cet album qui accumule fugues, catastrophes, et bêtises suscite chez sa mère une fierté évidente car ils sont le signe de sa bonne santé.

·          Eloïse de K Thompson et H Knight : Eloïse cherche avant tout à se faire remarquer et à combler le vide laissé par une mère toujours en voyage et un père dont elle n’entend jamais parler

·          L’horrible petite princesse de Nadja  « c’était pas exprès qu’elle était méchante la petite princesse » mais peut-être  «  parce que sa mère ne s’intéressait pas à elle »

LE POUVOIR DES REVES l’insuffisance des liens affectifs et le manque de disponibilité des adultes, vécus comme une souffrance, peuvent être compensés par des rêves libérateurs
Anna et le gorille d’Anthony Brown Anna bénéficie, certes en rêve, mais qu’importe ! de la présence d’un gorille sensible et tendre pour remplacer un père bien trop pris par la gestion de ses affaires.

PETITS ET GROS TRAVERS DES GRANDES PERSONNES L’humour est la voie privilégiée des auteurs qui s’entendent à caricaturer les excès dont les adultes font preuve.

Petit Chou de Quentin Blake

·          Bibi d’Elzbieta

Ces  deux albums racontent l’histoire d’un enfant vivant une relation fusionnelle avec une maman extrêmement possessive. Ils démontrent aussi combien ces comportements excessifs freinent l’acquisition d’une autonomie indispensable pour grandir.

·          Enchaîné de V Dayre et Sara, raconte la triste existence d’un chien qui ne compte pour personne.

Les auteurs qui s’adressent à l’enfance reconnaissent et surtout célèbrent sa pensée, ses affects et son imaginaire. Les jeux relationnels si bien mis en scène dans les albums contribuent ainsi à combler le déficit d’échanges quand ceux-ci sont absents ou à valoriser leurs bienfaits quand ils existent.

 

 

 

 

 

 

 

SES PEURS

 

La peur est une affaire de l’enfance. Elle est le sujet ou le ressort de bien des histoires.

Les histoires, avec leur  cortège de loups et de dragons, de sorcières, de serpents et de monstres donnent symboliquement forme à ses peurs dans des lieux hautement symboliques comme la forêt, la grotte. Elles parlent de nuit, d’abandon, de l’autre, ou encore du mystère de la vie.

Elles offrent aussi à l’enfant un espace poétique de rêverie dans lequel il peut explorer ses craintes, les désamorcer, les déplacer sur des contenus plus distanciés et ainsi élaborer des défenses.

Une interaction s’établit alors entre l’histoire qu’il écoute et son expérience passée, faisant de la lecture  un vécu qui contribue à  structurer sa personnalité.

 

Quelques livres références et thèmes évoqués

 

·        La peur de la séparation, apprendre à quitter sa maman

« bébés chouettes » de Martin Waddell, édition kaléidoscope

« je t’aime tous les jours »  de Malika Doray, édition Didier Jeunesse

 

·        La peur du noir

«  tu ne dors pas petit ours » de Martin Waddell,  édition Pastel

«  scritch, scratchclip clapote » de Kitty Crowther, édition Pastel

 

·        Les cauchemars

«  il y a un cauchemar dans mon placard » de Mayer Mercer, édition Gallimard jeunesse

« le cauchemar » de Claude Ponti l’école des loisirs

 

·        La peur du loup

« roulé le loup » de P Gay-Para,  édition Didier Jeunesse

« les trois petits pourceaux » de Coline Promeyrat

« le garçon qui criait « au loup » » de Tony Ross, édition Gallimard

« mademoiselle sauve qui peut » de P Corentin, édition école des loisirs

« les trois loups » d’Alex Cousseau, école des loisirs

« Plouf » de P Corentin, école des loisirs

« l’anniversaire de monsieur Guillaume », « une soupe aux cailloux » de Anaïs Vaugelade école des loisirs

«loulou » de Solotareff, école des loisirs

 

·        La peur de l’ogre

« monsieur l’ogre et la rainette » de Solotareff »école des loisirs

« le géant de Zéralda » de Tomi Ungerer

«  chien bleu »de Nadja école des loisirs

 

Joëlle Turin conclue : les enfants connaissent, et parfois jusqu’à la terreur, ces peurs d’un jour ou de toujours. Ils doivent pourtant parvenir à les combattre, car ils ne peuvent grandir harmonieusement que dans un sentiment de sécurité. Quand l’imaginaire des auteurs scénarise pour eux ces thèmes effrayants, ils donnent une forme aux angoisses par des représentations tangibles et maîtrisables. C’est d’évidence une bonne raison pour ne pas priver les jeunes lecteurs de ces peurs de papier.   

 

 

« Ces livres qui font grandir les enfants » suite

 

Dans le chapitre 5 de son livre J Turin aborde les grandes joies et petites peines à travers les albums jeunesse.

Les enfants vivent toutes leurs expériences avec intensité. Immergés dans le moment présent, les petits ne possèdent pas les outils du monde adulte qui aident à relativiser, à mettre de la distance. Chaque événement, qu’il soit vécu de manière positive ou négative, prend un relief démesuré. L’échange avec les autres fait jouer les passions dans le désordre et dans l’excès.

Les albums évoqués ci-dessous renvoient l’enfant au sentiment cruel de la solitude.

·        Marcel et Hugo d’Anthony Browne illustre la difficulté d’être dans un groupe et d’y remédier.

·        Le loup de Sara, bouc émissaire chassé par les autres  de la meute

·        Neige de Grégoire Solotareff évoque l’immense  solitude d’un loup blanc abandonné par ses parents qui ne veulent pas un louveteau différent d’eux. Au fil des pages nous découvrirons que nommer fait exister.

·        Moi et rien de Kitty Crowther pour  combler le vide de l’abandon l’enfant invente une présence imaginaire, un ami, un double : Rien. Lila trouvera une issue à son isolement et embellira le jardin qui est en elle.

 

Frustration et privation génèrent souvent chez l’enfant de grosses colères.

Certains auteurs adoptent le point de vue du rebelle, parviennent à exprimer le trouble profond qui habite l’enfant, la difficulté qu’il éprouve à sortir de l’engrenage de la violence et la souffrance que provoque cette relation défaillante.

·        Max et les Maximonstres de Maurice Sendak illustre ce propos.

Max, costumé en loup (image de son conflit intime)entreprend un voyage imaginaire au pays des monstres car il est puni par sa mère et doit rester dans sa chambre. Les changements dans le décor et dans l’attitude de Max reflètent son évolution psychologique, passant d’une colère ouverte à une irritation transformée en une rêverie compensatoire. Grandir c’est peut-être apprendre à maîtriser ses tendances hostiles.

·       Triste journée pour Johny d’Eward Ardizzone privilégie la voie de l’humour et de la  tendresse pour mettre en scène le sentiment persistant de mécontentement, d’injustice.

Le petit garçon mal luné passe sa mauvaise humeur sur son entourage et ne supporte aucune contradiction ce qui lui vaut le rejet de tous.

Au fil d’une trentaine de page sans texte, l’illustrateur décrit progressivement le difficile renoncement du héros à ses désirs et tendances agressives.

D’autres albums mettent en scène le sentiment de jalousie en rappelant les circonstances susceptibles de le provoquer. (une naissance, l’attachement fusionnel d’une mère et son fils, la rivalité…)

·        Jules, le plus beau bébé du monde de Kevin Henkes

·        John, Rose et le chat de Jenny Wagner

·        La vengeance de Germaine d’Emmanuelle Eeckhout

 

Les enfants ont un immense besoin de témoignages d’amour. Les auteurs les plus inspirés savent trouver bien des façons de les incarner, les livres sur ce sujet abondent.

·        Très, très fort Trish Cooke et Helen Oxenbury

·        Devine combien je t’aime de Mc Bratney et Anita Jeram

·        Les mots doux de Carl Norac et Claude K Dubois.

 

Rien ne saurait tarir le besoin de tendresse qui habite tout enfant, la nature optimiste de l’enfant l’emporte toujours. 

 

Quand ils parlent d’amitié, les livres prennent en compte que les besoins affectifs de l’enfant ne se limitent pas à l’entourage familial de l’enfant.

·        Trois amis de Helme Heine, l’amitié est une règle de vie pour le coq, la souris, et le cochon. Les aquarelles douces et lumineuses transmettent au lecteur un sentiment de joie et de bien être.

·        Loulou de Grégoire Solotareff, relation bien  particulière du jeune loup et du petit lapin. Comme le jeune enfant ils n’ont pas de peur ou de prévention à l’égard des différences.

·        Petit Bleu et Petit Jaune de Léo Lionni, ici aussi l’amitié est facteur d’émancipation et d’acceptation des différences. Les 2 amis sortent grandis de cette histoire et les parents y apprennent que leurs enfants peuvent sortir grandis, loin d’eux, et vivre des expériences qui les transforment et les enrichissent.

·        La vie de KumaKuma de Kazue Takahashi : un enfant se plaît à imaginer la vie de KumaKuma, jeune ours, à défaut de proximité réelle il crée une une proximité affective et sentimentale.

·        Angus et la chatte de Marjorie Flack dans cet album il s’agit de comparer les avantages à être seul ou accompagné. Il n’est pas facile de voir l’autre faire ce qui nous est interdit ou impossible.

 

Dans tous ces albums qui traitent de solitude, d’amitié, de jalousie, d’amour, de colère, les petits héros des livres se confrontent aux autres et apprennent quels renoncements exige la relation avec ses semblables.

 

 

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